Certes si nous avions vécu en l’an
dix-sept cent soixante
Est-ce bien la date que vous déchiffrez.
Anna, sur ce banc de pierre
Et que par malheur j’eusse été allemand.
Mais que par bonheur j’eusse été près
de vous
Nous aurions parlé d’amour de façon
imprécise
Presque toujours en francais
Et pendue éperdûment à mon bras
Vous m’auriez écouté vous parler de
Pythagoras
En pensant aussi au café qu’on
prendrait
Dans une demi-heure.
Et l’automne eût été pareil à cet
automne
Que l’epine-vinette et les pampres
couronnent
Et brusquement parfois j’eusse salué très
bas
De nobles dames grasses et
langoureuses
J’aurais dégusté lentement et tout seul
Pendant de longues soirées
Le tokay épais ou la malvoisie
J’aurais mis mon habit espagnol
Pour aller sur la route par laquelle
Arrive dans son vieux carrosse
Ma grand’mere qui se refuse à
comprendre l’allemand
J’aurais écrit des vers pleins de mythologie
Sur vos seins la vie champêtre et sur
les dames
Des alentours
J’aurais souvent cassé ma canne
Sur le dos d’un paysan
J’aurais aimé entendre de la musique
en mangeant
Du jambon
J’aurais juré en allemand je vous
le jure
Lorsque vous m’auriez surpris
embrassant à pleine bouche
Cette servante rousse
Vous m’auriez pardonné dans le bois
aux myrtilles
J’aurais fredonné un moment
Puis nous aurions écouté longtemps
les bruits du crepuscule
Zeker als we geleefd hadden in het jaar
zeventienhonderd zestig
is het niet de datum die je ontcijfert, Anna,
op deze stenen bank
en als ik per ongeluk Duits was geweest, maar
als ik door veel geluk dicht bij jou
was geweest
hadden we over de liefde gesproken op een
onduidelijke manier
bijna altijd in het Frans
en hartstochtelijk aan mijn arm hangend
zou je hebben geluisterd naar mijn spreken
tegen jou over Pythagoras
terwijl je ook dacht aan de koffie die we
zouden nemen
over een half uur.
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